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25 May 2022

Quelle place pour l'Afrique dans le 21ème siècle ?

A l’occasion de la journée mondiale de l’Afrique, le professeur Gilles Carbonnier analyse les défis du continent.
 

L’Afrique est plurielle ; un Continent de contrastes qui fascine et interpelle. Lors d’un séjour au Nigéria en début d’année, j’ai à nouveau été frappé par l’exceptionnelle créativité et le dynamisme de la jeunesse dans de grands centres urbains hyperconnectés. Mais j’ai aussi pu constater l’impact négatif de conflits de longue durée dans d’autres régions, avec des difficultés d’accès aux biens et services essentiels, notamment pour des milliers de personnes déplacées. 

Aujourd’hui, plus d’un tiers de la population africaine se retrouve en situation d’insécurité alimentaire en raison de l’effet combiné de la hausse du prix des denrées, du dérèglement climatique et de l’impact économique de la pandémie de COVID-19.

S’il faut se garder de toute généralité à l’égard d’un Continent si divers, il me semble que la variable démographique joue toutefois un rôle majeur : Alors que l’Asie poursuit sa transition vers une natalité en baisse et une population plus âgée – avec un coût du travail en hausse – la majorité des pays africains connaissent une croissance démographique vigoureuse. Ils acquièrent ainsi un nouvel avantage comparatif basé sur une abondance relative de main d’œuvre.

Dès lors, l’Afrique va-t-elle s’engager dans un processus d’industrialisation tel que l’ont connu d’autres continents au 20ème siècle, avec un développement des manufactures à haute intensité de main d’œuvre ?

Je ne le crois pas. D’une part, la lutte contre le changement climatique et la préservation de l’environnement requièrent d’imaginer d’autres modèles et de s’engager dans d’autres voies de développement et la promotion des énergies renouvelables. D’autre part, la transformation numérique offre de nouvelles perspectives que la jeunesse et les entrepreneurs africains explorent avec une inventivité sans pareil. 

La diversification de l’économie demeure néanmoins un défi majeur pour l’Afrique, dont nombre de pays peinent à réduire leur dépendance vis-à-vis de l’exportation de matières premières. Il s’agit de promouvoir une insertion dans les chaines de valeur mondiales par le biais de la transformation de matières premières sur place, et l’exportation de biens et services à plus haute valeur ajoutée. 

Un autre défi réside dans le renforcement des institutions étatiques. Cela passe par la génération d’une base fiscale suffisante pour que les Etats africains puissent mobiliser les ressources nécessaires afin de développer et financer les infrastructures et services publics de base. A ce titre, la réforme du système fiscal mondial offre une occasion de lutter contre les flux financiers illicites et l’érosion de la base fiscale des Etats africains.

Ces derniers doivent pouvoir participer pleinement aux négociations en cours, et renforcer leurs capacités à investir dans la réalisation des objectifs du développement durable.

Photo credit: Rohan Reddy  
Dar es Salaam, Tanzania